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RAÄVENA

/!\ 𝙏𝙒 : 𝙈𝙚𝙣𝙩𝙞𝙤𝙣 𝙙𝙚 𝙫𝙞𝙤𝙡 𝙙𝙖𝙣𝙨 𝙘𝙚 𝙘𝙝𝙖𝙥𝙞𝙩𝙧𝙚 /!\

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— Heureusement que toutes ces créatures ne parlent pas autant.

Je descendis de la plateforme sur laquelle j'étais montée avec le métis un peu plus tôt. Celui-ci me lança d'ailleurs un coup d'œil dubitatif à la suite de mes propos tandis qu'il quittait également l'élévateur pour mettre pied à terre.

— Cet ashia est un véritable moulin à parole, c'est presque épuisant.

— C'est certains que quand on n'a pas l'habitude qu'on nous parle autant, cela peut très vite devenir fatiguant.

— Tu te doutes bien que je n'en ai effectivement pas l'habitude. Surtout qu'on s'intéresse réellement à moi.

Revi m'avait posé tellement de questions sur ma condition de vampire et aussi un peu sur moi, même si j'avais esquivé celles-ci. Ce n'était pas arrivé depuis... en fait, ce n'était tout simplement jamais arrivé. Avec sa mère, c'était des interrogations de tous les jours, mais après sa capture, on ne s'était jamais intéressé à moi. Un esclave n'était rien de plus qu'un objet dont on se servait jusqu'à s'en lasser et ensuite, on n'avait pas besoin de connaitre son passé. Bien que je sois un cas un peu particulier puisque j'étais un sang pur, nombreux étaient ceux qui étaient curieux de connaitre mon ascendance, mais rien de plus. Alors mener une conversation dont j'étais le sujet principal s'avérait être quelque chose de tout nouveau pour moi. Ça n'avait pour autant pas été quelque chose de désagréable, j'avais apprécié l'ambiance chaleureuse dans laquelle j'avais baigné durant ces quelques heures. Cela m'avait rappelé les moments passés avec mes parents, autrefois.

Mes pas ralentirent quand deux gardes apparurent dans mon champ de vision. Erzaren m'ayant imité en fronçant un peu les sourcils. Certainement à cause de l'habitude, je n'eus aucun mal à deviner qu'il était là pour moi.

— Le souverain..., commença l'un des deux.

— Je vous suis, coupai-je en me mettant à marcher dans leur direction.

Je ne saluai pas le basané, ce serait vu comme comportement bien trop familier et je n'étais pas censée me lier d'amitié avec qui que ce soit. Ou en tout cas personne qui n'était pas esclave également. Nous étions tout en bas de la chaîne alimentaire, même les animaux étaient plus considérés que nous l'étions. Alors, montrer ouvertement que j'avais une affinité avec un proche de sa majesté, c'était inimaginable.

Sans surprise, je fus ramenée à la maison occupée par la famille royale. J'espérais que tout se soit bien déroulé pour Valaine, même si une petite voix dans sa tête me disait que ça n'avait pas été le cas, qu'il lui était arrivé quelque chose en mon absence. Je pénétrai les lieux à pas de loup et grimpai l'escalier pour aller rejoindre la chambre d'Alois, puisque c'était lui qui désirait la voir. J'appréhendais un peu de me retrouver à nouveau seule avec lui après ce qu'il s'était passé plus tôt dans la journée. M'avait-il fait appeler pour terminer ce qu'il avait commencé ? Cette idée me donna la chair de poule.

Arrivant devant la porte, je me tins en face de celle-ci de longues secondes avant de frapper contre le bois, trois petits coups. La voix grave de l'elfe souverain s'éleva à ce moment-là, m'accordant la permission d'entrer. J'abaissai la poignée et me glissai dans la pièce en refermant derrière moi une fois à l'intérieur. Mes billes écarlates se posèrent donc sur lui et un important frisson me traversa l'être. Ma bouche en devint même sèche. Il était assis de façon décontractée dans un fauteuil se trouvant dans un coin de la chambre, son vêtement de nuit grand ouvert sur son torse musclé alors que ses yeux céruléens étaient braqués sur moi. Avec la faible lumière des chandelles qui éclairait la pièce, cela lui donnait une aura sensuelle qui me bouleversa bien malgré moi. Mais en reniflant l'air, je me rendis compte que des fragrances alcoolisées flottaient dans l'atmosphère. Il avait donc bu, ce qui ne me rassurait pas forcément.

Les elfes étaient par nature cruels envers nous depuis la guerre, mais lorsque l'alcool entrait dans la partie, cette tendance s'en voyait dangereusement renforcée. En plus de réveiller chez certains de bas instincts charnels. Et ce que j'apercevais au fond des yeux du souverain tendait vers cela. Allait-il me violer ? Cette pensée provoqua aussitôt la mise en marche de mon mécanisme de défense face à ce genre de situation : la dissociation. Ce n'était pas arrivé la première fois qu'il m'avait touchée, tout simplement parce que l'atmosphère était très différente. Ici, j'avais le sentiment d'avoir sauté dans la gueule du loup.

— Déshabille-toi, ordonna-t-il d'une voix trop calme. Et grimpe sur le lit.

Aolis avait accompagné ses paroles d'un geste de la main qui désignait le couchage au centre de la pièce. Déglutissant à grande peine, je dénouai mon vêtement et laissai tomber sur le sol les divers éléments qui le composaient. Et lorsque je fus entièrement nue, je me déplaçai jusqu'au lit pour monter dessus, me positionnant à genoux, les mains sur les cuisses. Du coin de l'œil, je vis le roi quitter son siège d'un mouvement lent, mais souple, ne faisant qu'amplifier ma peur de ce qui allait suivre. Il échappa à mon regard quand il se glissa derrière moi. Le matelas s'affaissa un peu plus à cause du poids supplémentaire qui lui fut imposé et au moment où la chaleur d'un corps vint me caresser le dos, je cessai presque de respirer. Mon esprit commença à s'éloigner, fuyant les évènements à venir pour ne pas avoir à en souffrir.

Mais pas assez rapidement, malheureusement.

Au moment où les grandes mains d'Aolis se refermèrent sur mes hanches pour m'obliger à me pencher jusqu'à me trouver le visage dans les oreillers et la croupe relevée, j'espérai partir à ce moment-là. Sauf que non, c'était comme s'il m'avait totalement ramenée dans mon corps, ou presque. J'étais consciente, mais pas complètement, ce qui créait une sensation de vertige difficile à gérer. Je tressaillis quand mes cheveux se retrouvèrent ramassés et jetés sur le côté, dégageant ainsi ma nuque et mes épaules. Ses doigts encerclèrent la zone libérée et, du pouce, il caressa la base de mes mèches corbeau avant que ses extrémités ne traînent sur ma peau pâle. Le souverain elfique retraça les lignes noires qui décoraient mon échine avec une douceur telle que je faillis soupirer de bien être. Heureusement, je n'en fis rien, continuant de subir ces étranges caresses sans en comprendre le but.

Il tapota, à plusieurs reprises du bout de son doigt, dans le creux de mon dos, pile là où s'arrêtait une des traces obsidiennes, comme on le ferait sur la surface d'une table. Ce petit jeu me parut durer une éternité avant qu'il ne daigne enfin poursuivre son exploration qui le fit arriver sur ma croupe offerte, juste au-dessus de la raie de mes fesses.

— Je commence à me dire que ma tante est dans le vrai, souffla-t-il en saisissant l'une de mes deux rondeurs.

J'eus envie de protester, lui dire que ce n'était pas des tatouages, mais tout ce qui sortit de ma bouche fut un minuscule cri de surprise. Il me retourna rapidement sur le dos pour que je lui fasse face. Nos regards s'accrochèrent tandis qu'Aolis plaçait ma jambe droite sur son épaule, une main installée sur ma cuisse et mes lèvres frôlant mon mollet proche de sa tête. Ce simple effleurement me poussa à chercher à fuir son contact, sauf qu'il m'arrêta en faisant brusquement pression dans la chair de ma cuisse.

— Une sang pur sans marque de naissance, je n'ai jamais vu ça. Qu'est-ce que tu dissimules, Raävena ?

— Rien.

Je n'avais strictement rien à cacher, surtout dans une position comme celle qu'il m'imposait. J'étais nue comme au jour de sa naissance et complètement à sa merci. Nous nous fixâmes sans dire le moindre mot, le temps semblant se suspendre rien que pour nous. Et même quand un doigt s'installa sous mon nombril pour glisser jusqu'à mon pubis, provoquant un sursaut involontaire de mon corps. La crainte me gagna à nouveau, mais je ne parvenais toujours pas à dissocier, je restais coincée à cette limite ou mon esprit n'avait besoin que d'un pas pour sombrer. Je grelottais de peur, ce qui n'échappa pas à l'elfe qui continuait de me fixer intensément, son regard hypnotique me retenant dans la réalité. Un jappement raisonna dans la chambre au moment où il posa deux doigts sur mon clitoris, renforçant mes tremblements.

Je dissimulai mon visage dans l'oreiller, masquant ainsi, en même temps, les larmes qui me montèrent aux yeux.

Laisse-moi partir !

C'était ce que je souhaitai hurler à ce moment-là, sauf que ce fut un simple sanglot qui se fit entendre. Je sentis la pression disparaitre, ce qui m'étonna, je restai pourtant silencieuse, craignant un piège.

— Si tu ne veux pas, dis-le-moi, maintenant, lâcha-t-il d'une voix rauque de désir, sinon je ne répondrais plus de rien ensuite.

***

Refermant la porte derrière moi, je me laissai glisser contre celle-ci, me retrouvant sur le sol froid du couloir. Je tremblais encore de ce qui venait de se passer, j'avais véritablement envisagé que, cette fois, il allait me violer.

Et pourtant, il ne l'avait pas fait.

Il m'avait relâchée juste après que j'aie dit non, m'ordonnant de me rhabiller et de quitter la pièce. Il n'y avait eu aucun piège et aucune violence, la douceur dont il avait fait preuve à mon égard était incroyable. Le souvenir de ses mains sur ma peau remplit mes yeux de larmes. Cela n'était pas dû à la peur, mais bien parce qu'il ne m'avait fait aucun mal. Et je lui en voulais pour ça. J'étais en colère contre lui de ne pas m'avoir possédée par la force. À cause de ça, j'étais obligée d'être connaissante envers lui. Redevable de m'avoir demandé mon avis. Reconnaissante d'avoir respecté mon « non » et de m'avoir laissé partir alors qu'il aurait pu me rire au nez. Si Aolis avait abusé de moi dans cette chambre, j'aurais pu plus facilement le haïr et probablement rompre cette étrange connexion qu'il y avait entre nous.

Avec cet acte de bonté, je ne pouvais pas.

Je sentais encore l'odeur de sa peau contre la sienne, son toucher et la douceur de ses lèvres. Je n'avais jamais ressenti cela et ça avait un aspect dérangeant qui me donnait envie de me gratter à sang, pour tout faire disparaitre. C'était inexplicable, avec Edea ça n'avait rien à voir, ses attentions me laissaient complètement de marbre. Alors pourquoi avec son frère était-ce si bon ? Je reniflai et essuyai mes joues humides en me remettant debout, il était préférable qu'on ne me trouve pas en train de pleurer devant la porte d'Aolis. D'ailleurs, j'avais la larme trop facile à mon goût depuis le début de la journée, je savais pourtant que chialer ne changeait rien, il fallait que je me reprenne. Je regagnai silencieusement l'étage inférieur, en faisant disparaitre les dernières traces de mon récent chagrin, pour quitter la maison.

Du moins, c'était ce que j'avais l'intention de faire avant que l'émanation du sang ne vienne me chatouiller les narines. Mais pas uniquement, mon nez repéra en plus la senteur de la peur et de la tristesse, la fragrance salée des pleurs. Je fis halte et humai plus attentivement les lieux pour dénicher la source de l'odeur et cela me mena tout droit à la cuisine. Un froncement de sourcil apparut sur mon visage, je n'aimais pas ça. Cette odeur m'était un peu trop familière, comme je l'avais craint, il s'était passé quelque chose durant mon absence. Piétinant jusqu'à l'élément qui dégageait la fragrance ferreuse, je pénétrai dans la pièce pour trouver Valaine, cachée, dans un coin. Ma vision étant parfaitement adaptée à l'obscurité, je n'eus aucun mal à voir le sang qui maculait ses jambes. Il souillait sa peau des cuisses jusqu'aux chevilles. Il n'était pas difficile de deviner ce qu'il s'était passé pour qu'elle se retrouve dans un état comme celui-là.

Je m'approchai de ma cadette qui sursauta de la même manière qu'un petit animal effrayé au moment où je posai une main sur elle. Je ne m'en offusquai pas. Je comprenais sa peur, je l'avais aussi ressentie à son âge. Le viol était une arme qui pouvait détruire n'importe qui. Il vous retirait le droit d'être un être doté de conscience et de sentiments. Il vous réduisait à un corps sans aucune autre valeur que celle de pouvoir en user comme un objet. Portant ma consœur à la manière d'une princesse, je quittai pour de bon les lieux avec la jeune vampire. Une fois à l'extérieur de ces murs, Valaine laissa exploser sa peine et se mit à sangloter bruyamment, attirant l'attention des quelques individus encore dehors par cette heure tardive. On aurait pu me demander de la consoler, la rassurer, lui dire que ça irait... mais ce serait un mensonge. Ça n'irait plus jamais après ça. Parce que je savais parfaitement qui avait fait ça et maintenant qu'il l'avait fait, il recommencerait.

Ce type de tordu prenait un plaisir malsain à commettre ce genre d'acte immonde. Surtout sur des personnes fragiles comme l'était Valaine. Et je ne pouvais rien faire pour l'aider, même si j'en avais terriblement envie. L'image de ce pervers avec la gorge tranchée, en train de s'étouffer avec son sang, me traversa l'esprit l'espace d'un instant. Ma prise se resserra un peu sur la brune alors que je rejoignais les autres qui étaient toujours parqués avec le reste du matériel. Je ne leur adressai pas un mot, pas un regard, tout ce qui comptait pour moi à ce moment-là c'était de m'occuper de Valaine. Je déposai la plus jeune dans un des convois avec douceur, l'installant le plus confortablement possible avant d'aller chercher de quoi la nettoyer.

— Qu'est-ce qu'il se passe, Raävena ? demanda Qadir alors que je le dépassai.

Il n'obtint que mon silence pour toute réponse, la victime de cette histoire n'avait certainement pas envie que j'ébruite qu'elle s'était fait violer. Revenant près de ma congénère, j'humidifiai un tissu que je glissai ensuite sur mes jambes rougies par son sang qui séchait petit à petit. Je m'appliquai à débarrasser chaque centimètre de peau de ces tâches, le tout avec beaucoup de précautions, même si le plus difficile restait à faire. Je pris une grande inspiration et posai mes mains sur les genoux de la jeune femme pour pouvoir les lui écarter un peu plus. Mais, comme je m'y attendais, j'essuyai un refus physique lorsque la blessée resserra violemment les cuisses.

— Ne touche pas... ne regarde pas..., sanglota-t-elle morte de honte.

— Valaine, si je ne te nettoie pas, ça sera pire. Je ne suis pas ici pour porter un quelconque jugement sur ce qui t'est arrivé, j'ai vécu exactement la même chose que toi. Je sais à quel point c'est douloureux et à quel point tu dois te sentir humiliée et sale à cet instant.

Ses pleures reprirent de plus belle. Je me montrai patiente, attendant qu'elle envisage de me laisser faire. Il ne servait à rien de la brusquer, ça ne ferait qu'aggraver le malaise intense qu'elle ressentait déjà. J'ignorai combien de temps s'écoula avant que Valaine ne veuille bien desserrer les jambes de façon à ce que je nettoie son sexe meurtri. Je tentais de ne pas lui provoquer plus de douleur, mais aux contractions du corps de la blessée, je savais que c'était visiblement inutile. Je préférais ne pas imaginer ce que ce tordu avait bien pu essayer sur elle pour qu'elle se retrouve à ce point en sang. Par respect, je ne lui poserais pas de questions, je la laisserais venir à moi si elle avait envie de m'en parler plus tard.

— J'en ai assez..., marmonna Valaine. Pourquoi ils nous font ça... ?

Je suspendis mon geste, ne lui répondant pas tout de suite.

— Parce qu'ils peuvent.

Il n'y avait pas de meilleure explication que celle-là. Ils pouvaient donc, ils le faisaient. Et elle n'était pas au bout de ses peines, même si elle avait subi des agressions brutales sur une courte période pour une vampire qui n'avait, visiblement, jamais été violentée jusqu'ici. Maintenant, elle survivrait avec ces sensations pour toujours gravées dans sa mémoire et la seule délivrance serait la mort. C'était la vie qu'avaient choisi les autres êtres de Yiheon pour nous. Porter éternellement le poids de nos péchés était la malédiction que nos ancêtres, les traitres, nous avaient léguée et dont nous ne serions jamais libérés.

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